lundi 26 novembre 2007

L'encadrement des royaumes chrétiens

L’encadrement des royaumes Chrétiens.

Entre l’IVème et le X° phénomène majeur qui va transformer la société et le « paysage » dans le sens où la construction des églises va contribuer à modifier la structure du peuplement rural et le paysage urbain.

I. Une nouvelle religion adoptée par les empereurs romains.

  1. Une nouvelle religion universaliste…

Le christianisme est une religion née autour du ministère et de la prédication du Christ (Evangiles, Nouveau Testament). Du I° au III° siècle les chrétiens apparaissent comme les praticiens d’un mouvement religieux mineur, toutefois les adeptes sont de plus en plus nombreux et sont le plus souvent persécutés (grande persécution de l’empereur Dioclétien eu III°). Les premiers Chrétiens, mort dans le sang et la violence, sont vénérés et deviennent les martyrs rouges, premiers saints.

Leur dévouement à Dieu est perçu comme un comportement valeureux et au sommet du comportement humain.

La nouveauté de cette religion induit en fait la persécution organisée par les Romains. En effet, il s’agit d’une religion monothéiste mais surtout universelle, qui défie les différences linguistiques, culturelles, sociales, et s’adresse à tous.

C’est aussi une religion qui est liée à une certaine morale : le Chrétien doit conduire sa vie d’une certaine façon pour assurer le salut de son âme même si le poids du péché reste moindre pendant cette période.

  1. ….adoptée par les empereurs romains.

Le IV° correspond à un siècle fondateur dans l’histoire de l’Eglise chrétienne ; le siècle est aussi dénommé celui de la « paix de l’Eglise » il est marqué par deux grandes figures impériales.

L’empereur Constantin (306-337), en promulguant l’édit de Milan en 313, autorise le culte chrétien qui acquiert alors le même statut que les cultes païens.

Les persécutions chrétiennes sont globalement terminées. Avec Constantin, de toléré, la religion devient favorisée, car l’empereur et sa famille se convertissent au christianisme. Un premier art chrétien « officiel », lié à la famille de l’empereur et aux premiers évêques s’élabore et les premières églises sont édifiées.

Le second repère essentiel c’est le règne de Théodose I° (379-395) qui ordonne la fermeture des temples païens et l’arrêt des sacrifices. Le christianisme devient la religion officielle de l’empire. Le clergé se structure et s’affirme. Dans les cités de l’empire, l’évêque rassemble les fidèles de l’ecclésia dans un nouveau cadre spatial : la cathédrale.

C’est l’époque des pères de l’Eglise, des grands évêques qui sont aussi des théologiens et des auteurs. Ce siècle correspond à une phase d’effervescence où les évêques cherchent à mieux définir leur rôle, ils définissent la pensée des Chrétiens, discutent leur comportement. Ainsi, Augustin, évêque à Hippone, en Af.N. écrit un traité sur le comportement à avoir avec les morts ; il s’interroge sur la vie que doivent mener les prêtres qui le seconde. Ambroise évêque de Milan, cherche à lutter contre l’arianisme ; il écrit sur la symbolique du sacrement du baptême, Martin, évêque de Tours, a été l’ami d’Hilaire, prélat de Poitiers : il s’intéresse aux formes de vie des premiers moines. C’est aussi l’époque de la naissance du monachisme.

Cette période de définition est émaillée par de violents débats théologiques.

Rassemblés en Conciles, les évêques discutent et élaborent le dogme « orthodoxe » c'est-à-dire catholique, dont les grandes lignes sont définies par le concile de Nicée en 325.

C’est alors que le terme d’hérésie prend tout son sens et que ce développe notamment l’hérésie arienne, pratique chrétienne favorisée par les peuples barbares.

  1. Une christianisation des élites urbaines d’abord.

Théoriquement, depuis la seconde moitié du IV°, l’empire est chrétien, mais en pratique, la christianisation des populations est très progressive ; touche d’abord les élites, les empereurs, leur entourage et l’aristocratie romano-barbare.

L’empereur apparaît désormais comme un bienfaiteur des Chrétiens. Il contribue à la construction des grandes églises, protège le clergé, promulgue des lois en faveur du christianisme et intervient même parfois dans les débats théologiques en convoquant les conciles

Dans les grandes cités, certains aristocrates se convertissent au christianisme. Par exemple, à Bordeaux, Ausone (310- 394), docteur et poète occupe des fonction importantes. Il a été « maire » de Bordeaux, puis précepteur de l’empereur Gratien, à Trèves. Menant une vie aristocratique, appréciant les œuvres littéraires profanes, Ausone a sa manière de vivre le christianisme.

Parmi les peuples fédérés, certains ont conservés leurs droits, leurs coutumes mais aussi leur religion. Certains sont donc encore païens comme les Francs jusqu’au baptême de Clovis à la fin du V° ; d’autres plus nombreux sont chrétiens.

Cependant la plupart des peuples « barbare », sont ariens (Wisigoths, Vandales, Ostrogoths) Leur installation dans l’empire va donc susciter des conflits entre les membres du clergé arien et catholique, mais l’impact de ces conflits reste difficile à estimer.

Les raisons du choix de l’arianisme sont délicates à saisir, faute de source.

On sait que plusieurs prédicateurs ariens eurent du succès chez les Goths avant leur migration au sud du Danube. Le choix des Goths et la plupart des barbares résulte sans doute plus de traditions, de recherche d’une différence, plus que de convictions théologiques ! Par ailleurs, le clergé arien reste embryonnaire, mal organisé, il ne faut pas imaginer une véritable église parallèle mais des usages distincts. Dans la pratique d’ailleurs, rien de distingue une église arienne dans une église orthodoxe.

Ainsi à Ravenne, il existe deux cathédrales et deux baptistères, orthodoxe et arien, que rien ne distingue.

II. L’encadrement des Chrétiens : le clergé.

  1. Evêques et prêtres au service des fidèles.

La christianisation progressive de l’empire passe surtout par l’évangélisation des populations, assurée en grande partie par les membres du clergé dont la figure dominante est l’évêque.

Entre le milieu du IV° et la fin du V°, un évêque va siéger dans presque chaque cité romaine, il représente le chef de la communauté chrétienne.

Il réside donc dans le chef lieu de la cité et contrôle théoriquement un territoire qui prend peu à peu l’appellation de diocèse.

La répartition des sièges épiscopaux en Gaule est inégale, elle résulte de remaniements successifs mais aussi de la densité variable des anciennes cités gallo romaine.

Ainsi les cités épiscopales sont nettement plus nombreuses dans le sud de la Gaule, en Italie (200 sièges) que dans le Nord de l’Empire (3sièges au-delà du Rhin)

Le rôle des évêques est capital.

En premier lieu, il a une mission chrétienne évidemment. Il est responsable des fidèles, c'est-à-dire qu’il a charge d’âme et administre les sacrements.

En ce sens il incarne le pasteur et doit effectuer sa mission pastorale, c’est pourquoi il est pourvu d’une crosse. Il doit aussi protéger les démunis, évangéliser les populations à travers la prédication. La protection et le soin apportés aux personnes sont très importantes car ces actions sont en relation avec le concept de charité, central pour la figure épiscopale ; certains historiens ont alors employé le terme d’évergétisme chrétien pour qualifier cette « générosité », les biens de l’aristocratie étant redistribués en partie aux pauvres.

La construction de nouveaux pôles monumentaux dans les villes, les groupes épiscopaux, témoigne du pouvoir grandissant de l’évêque

Ces groupes réunissent une ou deux églises (dont la cathédrale) un grands baptistère indépendant, des bâtiments résidentiels pour l’évêque, souvent un « hôpital » et des bâtiments pour accueillir les pauvres.

De plus, les liens entre les évêques et l’aristocratie sont assez étroits notamment en Gaule. Les prélats sont souvent issus de grandes familles locales. Théoriquement l’évêque est élu par le « peuple » auquel le clergé s’ajoute peu après. En réalité ce peuple est souvent constitué par les élites urbaines.

Au VII°, le roi franc intervient de plus en plus dans le choix des évêques, dont il s’entoure d’ailleurs.

Entre le V° et le VI° avec l’affaiblissement de l’encadrement politique impérial, l’évêque devient bien souvent le seul maître de la cité, surtout dans les provinces occidentales, plus éloignées du pouvoir central comme en Gaule. Il incarne le défenseur de la ville, il s’avère bien souvent être l’administrateur, voire le percepteur des impôts.

Des liens entre les évêques existent et sont de plus en plus étroits. Ils se réunissent pour promulguer des lois, parfaire le dogme catholique, discuter des points litigieux. A l’échelle du diocèse, il s’agit du synode ; les réunions des évêques d’un royaume ou de l’ensemble de la chrétienté s’intitulent de conciles. Les évêques promulguent des canons, sortes de règles, dont le clergé doit se charger de l’application. Les canons révèlent les préoccupations du clergé chrétien et permettent souvent de constater que la christianisation n’est pas aboutie.

Peu à peu, ce clergé diocésain, se structure. Théoriquement le chef de la chrétienté est l’évêque de Rome, le pape, perçu come le successeur de l’apôtre Pierre.

Pour cette période, il a encore peu d’autorité concrète. Quelques grandes figures se distinguent comme Grégoire le Grand, à la fin du VI°, mais son pouvoir n’est pas réellement supérieur à celui des autres évêques. Il existe aussi des archevêques ; ce sont les chefs des évêques, d’une province ecclésiastique ; leur pouvoir s’affirme surtout à l’époque carolingienne.

Les chanoines sont des prêtres au service de l ‘évêque, ils apparaissent surtout à partir du VI° siècle. Ils peuvent aussi veiller au service liturgique d’une église vouée au culte d’un saint, d’une basilique.

Les diacres sont ceux qui aident l’évêque dans certaines tâches (lecture, port des cierges, de l’encens…)

Les prêtres se caractérisent par le fait qu’ils ont été ordonnés et peuvent donc administrer les sacrements au même titre que l’évêque, même si cette pratique intervient essentiellement à partir du VI°. Le prêtre est placé à la tête d’une paroisse rurale, division interne du diocèse.

Le christianisme n’est pas seulement pratiqué par les évêques et les prêtres définit comme le clergé séculier (c'est-à-dire en contact avec le siècle, le monde extérieur,) mais aussi par d’autres hommes les moines.

  1. Les premiers moines.

Dès le IV° siècle avec la fin des persécutions, des Chrétiens ont l’impression d’un relâchement de la rigueur de la religion. Certains d’entre eux vont aussi avoir le désir de mener une vie rigoureuse, en accord avec les paroles du Christ, loin du monde : ce sont les moines.

Le terme « moine » vient du grec monos qui signifie seul : le moindre est donc au départ un ermite. Le monachisme va se diffuser sur le pourtour de la Méditerranée, notamment en Orient (désert Egyptien, Palestine, Syrie) ou en Provence.

Ces premiers moines sont des ascètes, on les appelle les « fous de Dieu » car ils mettent en œuvre des pratiques étranges et extrêmes. C’est le cas d’Antoine, un ermite égyptien, qui vécut 5ans dans un tombeau depuis 20ans dans un fortin abandonné, à la recherche de Dieu. Syméon l’Ancien, près d’Antioche passa 20ans perché sur une colonne, c’est un stylite. Ces moines prient continuellement tout en jeûnant, en se privant de sommeil, en étant vêtu de haillons.

Ils génèrent l’admiration des populations qui font parfois une longue route (pèlerinage) pour prendre leur conseil. Ainsi la foule s’assemblait au pied de la colonne de Syméon, certains ramassaient de la terre pour confectionner des eulogies, sorte d’amulette à l’effigie du saint.

Cette rigueur extrême qui ne convient pas à tous, va susciter aussi un autre mode de vie, un apprentissage de cette ascèse en communauté : c’est la vie cénobitique.

Les moines cénobites vivent sous la direction d’un supérieur, un abbé.

Que ce soit en Orient ou en Occident, le monachisme à un succès grandissant. Cette prolifération monastique n’est pas très structurée, chaque monastère adopte le mode de vie qu’il souhaite et chaque groupe à ses propres règles de vie.

Les règles écrites vont se multiplier aux V° et VI°. Parmi elles, la règle de saint Benoît, écrit par un moine italien du milieu du VI° est appelé à un grand succès.

La vie de saint Benoît a été écrite par le pape Grégoire le grand (mort en 604)

Elle occupe les 38 premiers chapitres du second livre des Dialogues. Grâce à e texte on sait que Benoît est né à la fin du V° dans la province de Nursie en Ombrie dans une famille de la petite aristocratie. Après des études à Rome, il fuit pour se retirer dans une colonie d’ascètes. Il se retire seul dans une grotte près de Subiaco, à environ 70km au sud de Rome. Après 3ans, sa renommée est telle qu’il attire de nombreux disciples Ils forment alors des petits monastères de douze moines soumis à leur supérieur mais placés sous la dépendance du fondateur.

Vers 525, il se rend au Mont Cassin et y fonde un monastère où il y rédige sa règle. Il y meurt vers 547.

La règle de Saint Benoît comprend 73 chapitres, sans ordre précis, traitant de la perfection chrétienne et de l’organisation d’un monastère.

Le moine intègre les congrégations jusqu’à sa mort, comme une famille. Il est alors soumis à l’abbé auquel il doit obéissance.
Avant de prêter ses vœux définitifs, il suit une période de noviciat.

La Règle régit la vie quotidienne du moine : son sommeil, ses repas, la célébration régulière des prières, ses sorties, le travail manuel etc..

A partir de la fin du VI° le monachisme occidentale est enrichi par l’apport original du monachisme anglo-saxon et irlandais.

Ce monachisme est marqué par une ascèse rigoureuse et caractérisé par la nécessité de prergrination pre Dei, c'est-à-dire la fuite concrète de son pays, le voyage errant.

Le plus connu est Colomban qui a débarqué en Armorique vers 575, et prérégrina à travers la Gaule puis en Lombardie. Avec l’aide de l’aristocratie, il fonda plusieurs monastères du Luxeuil et Bobbio (il y meurt en 615). Il écrivit aussi une règle sévère qui a été adoptée par de nombreux monastère des royaumes francs.

L’architecture de ces premiers monastères est loin de ressembler à l’image classique de bâtiments disposés autour d’un cloître qui apparaît beaucoup plus tard. On connaît très mal la structure de ces premiers monastère, mais on sait que les bâtiments sont souvent réunit à l’intérieur d’une enceinte, d’un mur.

Ainsi entre le IV° et le VI°, on peut véritablement attester le triomphe du christianisme. D’abord pratiqué par les empereurs, puis les élites urbaines, il gagne progressivement l’ensemble de la société. De fait, l’encadrement des pratiques chrétiennes passe par la mise en place du clergé, premiers pas dans le processus de christianisation, long et complexe.

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